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LE CENTURION

Mais il ne put les convaincre, et alors il tenta de les attendrir en faisant châtier l’accusé. Puis il mit les accusateurs en demeure de choisir entre le scélérat Barrabas et Jésus. Mais ces accusateurs haineux n’hésitent pas. Ils choisissent Barrabas. C’est leur élu de prédilection, et si Pilatus le leur demandait, ils répondraient peut-être que Barrabas est leur Messie.

Après avoir épuisé les expédients, Pilatus est bien forcé de prononcer sur le fond du litige. Mais de tous les griefs accumulés sur la tête de Jésus un seul relève de sa juridiction, et paraît dénaturé à lui causer des embarras auprès de César :

— C’est que Jésus serait un prétendant à la royauté d’Israël. Représentant de César, Pilatus ne peut pas laisser impuni ce crime de haute trahison qu’on impute au jeune prophète.

Si Jésus voulait vraiment secouer le joug de Rome, reconquérir l’indépendance de son pays, et se faire proclamer roi, il mériterait la mort.

Mais rien ne paraissait moins vraisemblable à Pilatus.

Il est vrai qu’en réponse à la question que le gouverneur lui avait posée, Jésus avait répondu qu’il était le roi des Juifs ; mais il lui avait expliqué que son royaume n’était pas de ce monde. Et depuis trois ans qu’il prêchait, jamais il n’avait dénoncé la domination romaine, jamais il n’avait conseillé la désobéissance ou la rébellion, jamais il n’avait prononcé une parole qui pût faire