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LE CENTURION

— « Allons, dit Jésus, mon heure est venue. » Il se dirigea vers l’escalier de la terrasse, et tous quittèrent le Cénacle pour se rendre au jardin de Gethsémani.

Il était dix heures, c’est-à-dire la quatrième heure de la nuit. Comme une lampe mystérieuse suspendue à la voûte céleste, la lune répandait sur la cité de David des flots de blanche lumière. Dans les rues teintées de demi-jour les tours et les coupoles dessinaient des ombres distinctes et précises. Rien n’est beau comme ces nuits calmes d’Orient, où tout semble dormir dans une sérénité immuable, sous les regards caressants de myriades d’étoiles.

Jésus marchait en tête, accompagné de Jean, et les autres disciples suivaient. Envahi lui-même par la tristesse que lui causait la lâche trahison de Judas, le Maître gardait le silence, et nul de ses compagnons n’osait élever la voix. Tous avaient le pressentiment qu’une nuit terrible commençait pour eux.

Après quelques minutes de marche, ils s’engagèrent dans la rue qui conduisait à la porte du Midi, et ils passèrent devant le palais des grands-prêtres Anne et Caïphe.

L’atrium était illuminé, et quelques hommes causaient à voix basse dans la cour autour d’un large brasero qui jetait des flammes rougeâtres.

C’est là que Judas s’était rendu en sortant du Cénacle, et il y faisait alors ses derniers préparatifs.