Page:Routhier - Le Centurion, roman des temps messianiques, 1909.djvu/301

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
299
LE CENTURION

Ce n’était pas sous cette forme qu’ils avaient attendu le triomphe définitif. Passer par la mort la plus ignominieuse pour arriver à la gloire leur paraissait un bien sombre chemin. Ils ne comprenaient pas les paroles du maître.

Ils ne comprenaient pas que chaque chose a son heure marquée dans les desseins de la Providence, et qu’il faut savoir l’attendre. Antérieurement, Jésus avait fui de Jérusalem, et même de la Galilée, quand ses ennemis avaient voulu le tuer. À plusieurs reprises, il s’était miraculeusement échappé de leurs mains. Pourquoi ? Parce que son jour n’était pas encore venu. Mais aujourd’hui l’heure approche, et, victime volontaire, il va se livrer lui-même. Au-devant de cette mort qu’il prévoit, qu’il annonce, il marche librement et fièrement.

Avant de mourir, cependant, il veut donner à ses ennemis une preuve nouvelle de sa puissance, même terrestre. Il veut leur montrer que le peuple est avec lui, et que s’il était sur terre pour jouer un rôle de révolutionnaire et de conquérant, il n’aurait qu’à le vouloir. Contre sa seule parole et ses miracles, que pourraient faire le sacerdoce Juif et la synagogue, et même la puissance Romaine ?

Mais toutes les démonstrations de sa popularité et de sa puissance n’ouvriront pas les yeux des sanhédrites, des scribes et des prêtres. Il y a un miracle que Dieu ne peut pas faire, tant il respecte la liberté humaine : c’est de guérir les aveugles