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Les Exploits d’Iberville

bonne ville de Québec ; mais cette fois celle de la mère Sauvageau était cependant fermée à clef.

Urbain trouva la plaisanterie mauvaise. Pourtant cachant sa mauvaise humeur :

— Ouvrez-moi la porte, dit-il en fredonnant, pour l’amour de Dieu !

— Pas même pour l’amour de vous.

— Allons, finissons-en, reprit-il avec humeur.

— Encore une fois, répondit Yvonne, je n’y suis pas pour vous.

À ces mots, une pensée mauvaise, un soupçon injurieux passa dans l’esprit du jeune homme. Reprenant la phrase de la jeune fille, et oubliant toute réserve, il eût le malheur de répondre :

— Vous n’y êtes pas… seule !

Il achevait à peine que la porte s’ouvrait brusquement et qu’Yvonne apparaissait devant lui les joues colorées d’une vive rougeur, l’œil irrité, la lèvre frémissante. D’une main retenant la porte, de l’autre montrant à Urbain d’un geste plein de dignité l’intérieur solitaire et tranquille de l’appartement :

— Entrez, monsieur, lui dit-elle, entrez donc, je ne serai plus seule alors et vous n’aurez pas menti !

Le jeune homme restait sur le seuil, immobile, confus et séduit. Il sentait l’injustice de ses soupçons. Il aurait en ce moment donné tout pour détruire l’impression produite. Mais le coup était porté, il ne pouvait plus qu’essayer de guérir la