Page:Rousseau - Fragments inédits éd. Jansen 1882.djvu/15

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

II ROUSSEAU ÉMULE DE DIOGÈNE


Afin de se procurer la liberté et l’indépendance, ces biens les plus précieux du philosophe, Rousseau renonça, en 1751, à la place lucrative de caissier de M. Dupin de Franceuil, et cela peu de semaines après l’avoir obtenue, »Je suis libre, écrit-il à Madame de Créqui: c’est un bonheur dont j’ai voulu goûter avant que de mourir . . . . . . je gagnerai ma vie et je serai homme; il n’y a point de fortune au-dessus de cela.«[1]

Rousseau parle quelquefois dans ses lettres à cette dame des promenades à Poissy. Dans ce village charmant, son ami et parent Mussard possédait une campagne, où le compositeur du Devin du Village aimait à séjourner. Tout la famille lui était chère et il était intimement lié avec le gendre de M. Mussard. C’était M. de Valmalette, maître d’hôtel du roi, le seul homme de cour, qu’il connût alors. Il lui écrit en 1751 une lettre dont malheureusement il ne s’est conservé que le fragment suivant:

»Quel long et injuste silence! mon cher ami; mais j’étais malade et paresseux. Aujourdui que je suis malade, paresseux et libre; aujourdui que je me fous de tous vous autres gens de Cour, aujourdui que tous les Rois de la terre avec toutte leur morgue, tous leurs titres et tout leur or ne me feraient pas faire un pas« . . . . . . . . . .[2]

  1. Oeuvres compl. Correspondance. X. 72. Rousseau à Mme. de Créqui, Ce vendredi . . 1752, Il faut mettre 1751.
  2. Manuscr. de Neuchâtel.