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INTRODUCTION 6j

raie », les citoyens s'engagent à obéir à la loi mais à n'obéir qu'à elle. Toute autre autorité enlèverait à la loi sa suprématie. Le gouvernement n'est donc plus une puissance distincte, mais seulement un instrument d'exécution au service de la volonté générale, et le seul souverain est le peuple tout entier, dont l'autorité n'a plus d'autres limites (*) que celles que son propre intérêt et sa conscience morale lui prescrivent de s'im- poser à lui-même. La doctrine du contrat social devient donc, chez Rousseau, purement et absolument démo- cratique.

D'autre part, l'idée même du contrat prend, dans son système, une signification et une valeur nouvelles. Dans toutes les théories antérieures, les stipulations du contrat tiraient uniquement leur validité du consente- ment des contractants : ils pouvaient décider ceci ou cela; quelle qu'elle fût, leur décision devenait souve- raine, du moment qu'elle était librement rendue. Pour Rousseau, les stipulations du contrat sont nécessaire- ment déterminées par la nature même des choses, et un peuple ne peut pas être un peuple libre s'il n'en accepte et n'en proclame les formules. Ce n'est donc pas le simple fait du consentement une fois donné qui oblige ensuite les contractants : ce fait même a été l'expression nécessaire de la raison, reconnaissant les obligations qu'entraîne le droit naturel. Le contrat social ne nous lie pas seulement parce que nous avons promis d'y rester fidèles, mais parce qu'il est, dans toute société, la conséquence nécessaire et, en quelque sorte, le subs-

��(*) Jurieu disait au contraire : quand les souverains sont institués, l'obéissance leur est due, de par « toutes les lois de Dieu, naturelles et positives » fXVl, n) ; « c'est aux Puissances souveraines ù juger de ce qui est nécessaire et de ce qui ne l'est pas » (XVI, un ; « on ne doit jamais résister dans un Élat à la volonté du souverain que quand elle va directement et pleine- ment à la ruine de la société » (XVI, v).

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