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les jours de férie et de marché, où les gens de la campagne, venant à Rome pour leurs affaires, n’avaient pas le temps de passer la journée dans la place publique. Par le troisième, le sénat tenait en bride un peuple fier et remuant, et tempérait à propos l’ardeur des tribuns séditieux ; mais ceux-ci trouvèrent plus d’un moyen de se délivrer de cette gêne.

Les lois et l’élection des chefs n’étaient pas les seuls points soumis au jugement des comices ; le peuple romain ayant usurpé les plus importantes fonctions du gouvernement [1], on peut dire que le sort de l’Europe était réglé dans ses assemblées. Cette variété d’objets donnait lieu aux diverses formes que prenaient ces assemblées, selon les matières sur lesquelles il avait à prononcer.

Pour juger de ces diverses formes, il suffit de les comparer. Romulus, en instituant les curies, avait en vue de contenir le sénat par le peuple et le peuple par le sénat, en dominant également sur tous. Il donna donc au peuple, par cette forme, toute l’autorité du nombre pour balancer celle de la puissance et des richesses qu’il laissait aux patriciens [2]. Mais, selon l’esprit de la monarchie, il laissa cependant plus d’avantage aux patriciens par l’influence de leurs clients sur la pluralité des suf-

  1. L’autorité exécutive avait en effet d’abord appartenu aux rois et à une aristocratie patricienne peu nombreuse dans laquelle se recrutait le sénat.
  2. On sait que Romulus est vraisemblablement un personnage purement légendaire. — Les assemblées par curies semblent avoir toujours eu dans les premiers temps, un caractère aristocratique et patricien : les plébéiens en étaient très probablement exclus.