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mixte qui participoit du caractere de deux Genres ou de tous les trois. Or il faut bien remarquer que dans ce mélange de Genres, qui étoit très-rare, on n’employoit pas pour cela plus de quatre cordes ; mais on les tendoit ou relâchoit diversement durant une même Piece ; ce qui ne paroît pas trop facile à pratiquer. Je soupçonne que peut-être un Tétracorde étoit accordé dans un Genre, & un autre dans un autre ; mais les Auteurs ne s’expliquent pas clairement au-dessus.

On lit dans Aristoxène, (L. I. Part. II) que jusqu’au tems d’Alexandre, le Diatonique & le Chromatique étoient négligés des anciens Musiciens, & qu’ils ne s’exerçoient que dans le Genre Enharmonique, comme le seul digne de leur habileté ; mais ce Genre étoit entiérement abandonné du tems de Plutarque, & le Chromatique aussi fut oublié, même avant Macrobe.

L’étude des écrits des Anciens, plus que le progrès de notre Musique, nous a rendu ces idées, perdues chez leurs successeurs. Nous avons comme eux le Genre Diatonique, le Chromatique & l’Enharmonique, mais sans aucunes divisions ; & nous considérons ces Genres sous des idées fort différentes de celles qu’ils en avoient. C’étoient pour eux autant de manieres particulieres de conduire le Chant sur certaines cordes prescrites. Pour nous, ce sont autant de manieres de conduire le corps entier de l’Harmonie, qui forcent les Parties à suivre les Intervalles prescrits par ces Genres ; de sorte que le Genre appartient encore plus l’Harmonie qui l’engendre, qu’il la Mélodie qui le fait sentir.