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exécutons tout le mérite du plaisir qu’ils peuvent donner, ont eu peine a empêcher le Public de sentir les beautés de la Musique Italienne livrée a nos archets. Nous avons donc écorche & cette Musique & les oreilles des spectateurs, avec une intrépidité sans exemple & capable de rebuter les plus détermines bouffonistes. Il est vrai que l’entreprise etoit hazardeuse, & que par-tout ailleurs la moitie de notre bande se seroit fait mettre vingt fois au cachot, mais nous connoissons nos droits & nous en usons. C’est le Public, s’il se plaint, qui sera mis au cachot.

Non conteras de cela, nous avons joint l’intrigue a l’ignorance & a la mauvaise volonté ; nous n’avons pas oublie de dire autant de mal des Acteurs que nous en faisions a leur Musique, & le bruit du traitement qu’ils ont reçu de nous a opère un, très-bon effet en dégoûtant de venir a Paris, pour y recevoir des affronts, tous les bons sujets que Bambini a tache d’attirer. Réunis par un puissant intérêt commun & par le désir de venger la gloire de notre archet, il ne nous a pas été difficile d’écraser de pauvres etrangers, qui, ignorant les mysteres de la boutique, n’avoient d’autres protecteurs que leurs talens, d’autres partisans que les oreilles sensibles & équitables, ni d’autre cabale que le plaisir que le plaisir qu’ils s’efforçoient de faire aux spectateurs. Ils ne savoient pas, les bonnes-gens, que ce plaisir même aggravoit leur crime & acceleroit leur punition. Ils sont prêts a la recevoir enfin, sans même qu’ils s’en doutent ; car pour qu’ils sentent davantage, nous aurons la satisfaction de les voir congédies brusquement, sans être avertis ni payes, & sans, qu’ils aient eu le