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Qu’on joigne a cela les fredons, les cadences, les ports-de-voix qui reviennent a chaque instant, & qu’on me dise quelle analogie il peut y avoir entre la parole & toute cette maussade pretintaille, entre la déclamation & ce prétendu récitatif ? qu’on me montre au moins quelque cote par lequel on puisse raisonnablement vanter ce merveilleux récitatif François, dont l’invention fait la gloire de Lully ?

C’est une chose assez plaisante que d’entendre les Partisans de la Musique Françoise, se retrancher dans le caractere de la langue, & rejetter sur elle des défauts dont ils n’osent accuser leur idole, tandis qu’il est de toute évidence que le meilleur récitatif qui petit convenir a la langue Françoise doit être oppose presque en tout, à celui qui y est en usage : qu’il doit rouler entre de fort petits intervalles, n’élever ni n’abaisser beaucoup la voix, peu de sons soutenus, jamais d’éclats, encore moins de cris, rien sur-tout qui ressemble au chant, peu d’inégalité dans la durée ou valeur des notes, ainsi que dans leurs degrés. En un mot le vrai récitatif François, s’il peut y en avoir un, ne se trouvera que dans une route directement contraire à celle de Lully & de ses successeurs ; dans quelque route nouvelle, qu’assurément les Compositeurs Françoise, si fiers de leur faux savoir, & par conséquent si éloignes de sentir & d’aimer le véritable, ne s’aviseront pas de chercher si-tôt, & que probablement ils ne trouveront jamais.

Ce seroit ici le lieu de vous montrer par l’exemple du récitatif Italien, que toutes les conditions que j’ai supposées dans un bon récitatif, peuvent en effet s’y trouver ; qu’il