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selon des circonstances tout-à-foit indépendantes de la durée des peuples, & qui pourroient n’avoir jamais eu lieu chez des nations très-anciennes. On ignore durant combien de siècles l’art des hiéroglyphes fut peut-être la seule écriture des Égyptiens ; & il est prouvé qu’une telle écriture peut suffire à un peuple policé, par l’exemple des Mexicains, qui en avoient une encore moins commode.

En comparant l’alphabet cophte à l’alphabet syriaque ou phénicien, on juge aisément que l’un vient de l’autre ; & il ne seroit pas étonnant que ce dernier fût l’original, ni que le peuple le plus moderne eût à cet égard instruit le plus ancien. Il est clair aussi que l’alphabet grec vient de l’alphabet phénicien ; l’on voit même qu’il en doit venir. Que Cadmus ou quelque autre l’oit apporté de Phénicie, toujours paroît-il certain que les Grecs ne l’allerent pas chercher & que les Phéniciens l’apporterent eux-mêmes : car, des peuples de l’Asie & de l’Afrique, ils furent les premiers & presque les seuls qui commercerent en Europe, & ils vinrent bien plutôt chez les Grecs que les Grecs n’allerent chez eux : ce qui ne prouve nullement que le peuple grec ne soit pas aussi ancien que le peuple de Phénicie.

D’abord les Grecs n’adopterent pas seulement les caractères des Phéniciens, mais même la direction de leurs lignes de droite à gauche. Ensuite ils s’aviserent d’écrire par sillons, c’est-à-dire, en retournant de la gauche à la droite, puis de


Je compte les Carthaginois pour Phéniciens, puisqu’ils étoient une colonie de Tyr.