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c’est-a-dire, qu’on faisoit passer plus vite les sons par lesquels on exprimoit les syllabes brèves, & durer un peu plus long-tems ceux qu’on adaptoit aux longues. On poussa bientôt les choses plus loin, & l’on établit à l’imitation de la Poésie une certaine régularité dans la durée des sons, par laquelle on les assujettissoit à des retours uniformes qu’on s’avisa de mesurer par des mouvemens égaux de la main ou du pied, & d’ou, à cause de ce la, ils prirent le nom de mesures. L’analogie est visible à cet égard entre la Musique & la Poésie. Les vers sont relatifs aux mesures, les pieds aux tems, & les syllabes aux notes. Ce n’est pas assurément donner dans des absurdités, que de trouver des rapports aussi naturels, pourvu qu’on n’aille pas, comme le P. Souhaitti, appliquer à l’une les signes de l’autre, & à cause de ce qu’elles ont de semblable, confondre ce qu’elles ont de différent.

Ce n’est pas ici le lieu d’examiner en Physicien d’ou naît cette égalité merveilleuse que nous éprouvons dans nos mouvemens, quand nous battons la mesure ; pas un tems qui passe l’autre ; pas la moindre différence dans leur durée successive, sans que nous ayons d’autre regle que notre oreille pour la déterminer : il y à lieu de conjecturer qu’un effet aussi singulier part du même principe qui nous fait entonner naturellement toutes les consonnances. Quoi qu’il en soit, il est clair que nous avons un sentiment sur pour juger du rapport mouvemens, tout comme de celui des sons, & des organes toujours prêts à exprimer les uns & les autres, selon les mêmes rapports, & il me suffit, pour ce que j’ai à dire, de remarquer le fait sans en rechercher la cause.