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opposes, & il aime mieux se plaindre éternellement d’être mal servi, que de se donner des soins pour l’être mieux.

C’est précisément ce qui arrive dans la Musique ; on se récrie sur la longueur des Maîtres & sur la difficulté de l’Art, & l’on rebute ceux qui proposent de l’éclaircir & de l’abréger. Tout le monde convient que les caracteres de la Musique sont dans un état d’imperfection peu proportionne aux progrès qu’on à faits dans les autres parties de cet Art : cependant on se défend contre toute proposition de les reformer, comme contre un danger affreux : imaginer d’autres signes que ceux dont s’est servi le divin Lulli, est non-seulement la plus haute extravagance dont l’esprit humain soit capable, mais c’est encore une espece de sacrilège. Lulli est un Dieu dont le doigt est venu fixer à jamais l’état de ces sacres caracteres : bons ou mauvais, il n’importe, il faut qu’ils soient éternises par ses Ouvrages ; il n’est plus permis d’y toucher sans se rendre criminel, & il faudra, au pied de la lettre, que tous les jeunes Gens qui apprendront désormais la Musique, paient un tribut de deux ou trois ans de peine au mérite de Lulli.

Si ce ne sont pas-là les propres termes, c’est du moins le sens des objections que j’ai oui faire cent fois contre tout projet qui tendroit à reformer cette partie de la