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Ah ! qu’un amant à de folie
D’aimer, de haÏr tour-à-tour :
Ce qu’il donne à la jalousie,
Je le donne tout à l’amour.
THEMIRE.
Je crains ce qu’il en coûte à devenir trop tendre ;
Non, l’amour dans les cœurs cause trop de tourmens.
ANACREON.
Si l’hiver dépare nos champs
Est-ce à Flore de les défendre
S’il est des maux pour les amans.
Est-ce à l’amour qu’il faut s’en prendre ?
Sans la neige & les orages,
Sans les vents & leurs ravages,
Les fleurs naîtroient en tous tems.
Sans la froide indifférence,
Sans la fiere résistance,
Tous les cœurs seroient contens.
THEMIRE.
Vous vous piquez d’être volage,
Si je forme des nœuds, je veux qu’ils soient constans.
ANACREON.
L’excès de mon ardeur est un plus digne hommage
Que la fidélité des vulgaires amans ;
Il vaut mieux aimer davantage,
Et ne pas aimer si long-tems.