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hommes vivent en société, il y a eu des Peuples polis, & d’autres qui ne l’etoient pas. M. Gautier a oublie de nous rendre raison de cette différence.

M. Gautier est par-tout en admiration de la pureté de nos mœurs actuelles. Cette bonne opinion qu’il en a, fait assurément beaucoup d’honneur aux siennes ; mais elle n’annonce pas une grande expérience. On diroit au ton dont il en parle qu’il a étudie les hommes comme les Péripatéticiens étudioient la Physique, sans sortir de son cabinet. Quant à moi, j’ai ferré mes Livres ; & après avoir écouté parler, les hommes, je les ai regardé agir. Ce n’est pas une merveille qu’ayant suivi des méthodes si différentes, nous nous rencontrions si peu dans nos jugemens : Je vois qu’on ne sauroit employer un langage plus honnête que celui de notre siecle ; & voilà ce qui frappe M. Gautier : mais je vois aussi qu’on ne sauroit avoir des mœurs plus corrompues, & voilà ce qui me scandalise. Pensons-nous donc être devenus gens de bien, parce qu’à force de donner des noms décens à nos vices, nous avons, appris à n’en plus rougir ?

Il dit encore que quand même on pourroit prouver par, des faits que la dissolution des mœurs à toujours regne avec le sciences, il ne s’ensuivroit pas que le fort de la probité dépende de leur progrès. Après avoir employé la premiere Partie de mon Discours à prouver que ces choses avoient toujours, marche ensemble, j’ai destine la seconde à montrer qu’en effet l’une tenoit à l’autre. À qui donc puis-je imaginer que M. Gautier veut répondre ici ?

Il me paroit sur-tout très-scandalise de la maniere dont j’ai