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cette inſpection ne me ſuffira pas pour décider ſur toute autre plante ſi ce que je vois eſt ou n’eſt pas la fleur ; car il y a multitude de végétaux qui n’ont dans aucune de leurs parties la couleur apparente que Ray, Tournefort, Jungins ſont entrer dans la définition de la fleur, & qui pourtant portent des fleurs non moins réelles que celles du roſier, quoique bien moins apparentes.

On prend généralement pour la fleur la partie colorée de la fleur qui est la corolle, mais on s’y trompe aiſément ; il a des bractées & d’autres organes autant & plus colorés que la fleur même & qui n’en ſont point partie ; comme on le voit dans l’Ormin, dans le Bled-de-vache, dans pluſieurs Amaranthes & Chenopodium ; il y a des multitudes de fleurs qui n’ont point du tout de corolle, d’autres qui l’ont ſans couleur, ſi petite & ſi peu apparente, qu’il n’y a qu’une recherche bien ſoigneuſe qui puiſſe l’y faire trouver. Lorſque les bleds ſont en fleur, y voit-on des pétales colorés, en voit-on dans les mouſſes, dans les graminées ? En voit-on dans les chatons du Noyer, du Hêtre & du Chêne, dans l’Aune, dans le Noisetier, dans le Pin, & dans ces multitudes d’arbres & d’herbes qui n’ont que des fleurs à étamines ? Ces fleurs néanmoins n’en portent pas moins le nom de fleurs ; l’eſſence de la fleur n’est donc pas dans la corolle.

Elle n’eſt pas non plus ſéparément aucune des autres parties conſtituantes de la fleur, puiſqu’il n’y à aucune de ces parties qui ne manque à quelques eſpeces de fleurs. Le calice manque, par exemple, à preſque toute la famille des liliacées, & l’on ne dira pas qu’une Tulipe ou un Lis ne ſont pas une fleur. S’il y