Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/143

Cette page n’a pas encore été corrigée

sur les merveilles de l’entendement, que cette autre faculté infiniment plus sublime & plus capable d’élever & d’ennoblir l’ame, n’y est jamais comptée pour rien ? Voilà l’effet toujours assure de la culture des lettres. Je suis sur qu’il n’y a pas actuellement un savant qui n’estime beaucoup plus l’éloquence de Ciceron que son zele, & qui n’aimât infiniment mieux avoir compose les Catilinaires que d’avoir sauve son pays.

L’embarras de mes adversaires est visible toutes les fois qu’il faut parler de Sparte. Que ne donneroient-ils point pour que cette fatale Sparte n’eut jamais existe ? & eux qui prétendent que les grandes actions ne sont bonnes qu’a être célébrées, à quel prix ne voudroient-ils point que les siennes ne l’eussent jamais été. C’est une terrible chose qu’au milieu de cette fameuse Grece qui ne devoit, dit-on, sa vertu qu’a la Philosophie, l’Etat ou la vertu a été la plus pure & à dure le plus long-tems ait été précisément celui ou il n’y avoit point de Philosophes. Les mœurs de Sparte ont toujours été proposées en exemples à toute la Grace ; toute la Grece etoit corrompue, & il y avoit encore de la vertu à Sparte ; toute la Grece etoit esclave, Sparte seule etoit encore libre : cela est dessolant. Mais enfin la fière Sparte perdit ses mœurs & sa liberté, comme les avoit perdues la savante Athenes ; Sparte à fini. Que puis-je répondre la à cela ?

Encore deux observations sur Sparte, & je passe à autre chose ; voici la premiere. Après avoir été plusieurs fois sur le point de vaincre, Athenes fut vaincue, il est vrai ; & il est surprenant qu’elle ne l’eut pas été plutôt, puisque l’Attique etoit un pays tout ouvert, & qui ne pouvoit se défendre que