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métier. Tout homme doit être soldat pour la défense de sa liberté ; nul ne doit l’être pour envahir celle d’autrui : & mourir en servant la patrie est un emploi trop beau pour le confier à des mercenaires. Faut-il donc, pour être dignes du nom d’hommes, vivre comme les lions & les ours ? Si j’ai le bonheur de trouver un seul Lecteur impartial & ami de la vérité, je le prie de jeter un coup-d’œil sur la société actuelle, & d’y remarquer qui sont ceux qui vivent entr’eux comme les lions & les ours, comme les tigres & les crocodiles. Erigera-t-on en vertu les facultés de l’instinct pour se nourrir, se perpétue & se défendre ? Ce sont des vertus, n’en doutons pas, quand elles sont guidées par la raison & sagement ménagées r & ce sont, sur-tout, des vertus quand elles sont employées à l’assistance de nos semblables. Je ne vois-ici que des vertus animales peu conformes. À la dignité de notre être. Le corps est exerce, mais l’ame esclave ne fait que ramper & languir. Je dirois volontiers en parcourant les fastueuses recherches de toutes toutes nos Académies : " Je ne vois-là que d’ingénieuses subtilités, peu conformes à la dignité de notre être. L’esprit est exerce, mais l’ame esclave ne sait que ramper & languir." Otez les Arts du monde, nous dit-on ailleurs, que reste-t-i1 ? les exercices du corps & les passions. Voyez, je vous prie, comment la raison & la vertu sont toujours oubliées ! Les Arts ont donne l’être aux plaisirs de famé, les seuls qui soient dignes de nous. C’est-à-dire qu’ils en ont substitue d’autres à celui de bien faire, beaucoup plus digne de nous encore. Qu’on suive l’esprit de tout ceci, on y verra, comme dans les raisonnemens de la plupart de mes adversaires, un enthousiasme si marque