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ne faisoit pas mieux, & Virgile eut pu tirer d’un colombier l’une de ses plus charmantes images.

Quand on pourroit nier qu’un sentiment particulier de pudeur fut naturel aux femmes, en seroit-il moins vrai que, dans la Société, leur partage doit être une vie domestique & retirée, & qu’on doit les élever dans des principes qui s’y rapportent ? Si la timidité, la pudeur, la modestie qui leur sont propres sont des inventions sociales, il importe à la Société que les femmes acquièrent ces qualités ; il importe de les cultiver en elles, & toute femme qui les dédaigne offense les bonnes mœurs. Y a-t-il au monde un spectacle aussi touchant, aussi respectable que celui d’une mere de famille entourée de ses enfans, réglant les travaux de ses domestiques, procurant à son mari une vie heureuse, & gouvernant sagement la maison ? C’est-la qu’elle se montre dans toute la dignité d’une honnête-femme ; c’est-la qu’elle impose vraiment du respect, & que la beauté partage avec honneur les hommages rendus à la vertu. Une maison dont la maîtresse est absente, est un corps fans ame qui bientôt tombe en corruption ; une femme hors de sa maison perd son plus grand lustre, & dépouille de ses vrais ornemens, elle se montre avec indécence. Si elle a un mari, que cherche-t-elle parmi les hommes ? Si elle n’en a pas, comment s’expose-t-elle a rebuter, par un maintien peu modeste, celui qui seroit tente de le devenir ? Quoiqu’elle puisse faire, on sent qu’elle n’est pas à sa place en public, sa beauté même, qui plaît sans intéresser, n’est qu’un tort de plus que le cœur lui reproche. Que cette impression nous vienne de la nature ou de l’éducation,