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impôts, sur lesquels on ne le consulte pas davantage. Il s’élève quelques plaintes ; on les dédaigne ; & tout se tait.

En 1725, le terme des impôts expire, il s’agit de les prolonger. C’étoit pour la Bourgeoisie le moment tardif, mais nécessaire, de revendiquer son droit négligé si long-tems. Mais la peste de Marseille & la Banque royale ayant dérangé le commerce, chacun, occupé des dangers de sa fortune, oublie ceux de sa liberté. Le Conseil, qui n’oublie pas ses vues, renouvelle en Deux-Cent les impôts, sans qu’il soit question du Conseil général.

À l’expiration du second terme les Citoyens se réveillent, &, après cent soixante ans d’indolence, ils réclament enfin tout de bon leur droit. Alors, au lieu de céder ou temporiser, on trame une conspiration.*

[*Il s’agissoit de former, par une enceinte barricadée, une espèce de Citadelle autour de l’élévation sur laquelle est l’Hôtel-de-Ville, pour asservir de-là tout le Peuple. Les bois déjà préparés pour cette enceinte, un plan de disposition pour la garnir, les ordres donnés en conséquence aux Capitaines de la garnison, des transports de munitions & d’armes de l’Arsenal à l’Hôtel-de-Ville, le tamponnement de vingt-deux pièces de canon dans un boulevard éloigné, le transmarchement clandestin de plusieurs autres, en un mot tous les apprêts de la plus violente entreprise faits sans l’aveu des Conseils par le Syndic de la Garde & d’autres Magistrats, ne purent suffire, quand tout cela fut découvert, pour obtenir qu’on fît le procès aux coupables, ni même qu’on improuvât nettement leur projet. Cependant la Bourgeoisie, alors maîtresse de la Place, les laissa paisiblement sortir sans troubler leur retraîte, sans leur faire la moindre insulte, sans entrer dans leurs maisons, sans inquiéter leurs familles, sans toucher à rien qui leur appartînt. En tout autre pays le Peuple eût commencé par massacrer ces Conspirateurs, & mettre leurs maisons au pillage.] Le complot se découvre ; les Bourgeois sont forcés de prendre les armes, & par