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Nous examinerons s’il est possible que le peuple se dépouille de son droit de souveraineté pour en revêtir un homme ou plusieurs ; car l’acte d’élection n’étant pas une loi, & dans cet acte le peuple n’étant pas souverain lui-même, on ne voit point comment alors il peut transférer un droit qu’il n’a pas.

L’essence de la souveraineté consistant dans la volonté générale, on ne voit point non plus comment on peut s’assurer qu’une volonté particulière sera toujours d’accord avec cette volonté générale. On doit bien plutôt présumer qu’elle y sera souvent contraire ; car l’intérêt privé tend toujours aux préférences, & l’intérêt public à l’égalité ; &, quand cet accord seroit possible, il suffiroit qu’il ne fût pas nécessaire & indestructible pour que le droit souverain n en pût résulter.

Nous rechercherons si, sans violer le pacte social, les chefs du peuple, sous quelque nom qu’ils soient élus, peuvent jamais être autre chose que les officiers du peuple, auxquels il ordonne de faire exécuter les lois ; si ces chefs ne lui doivent pas compte de leur administration, & ne sont pas soumis eux-mêmes aux lois qu’ils sont chargés de faire observer.