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ou quatre ans que nous avons à remplir ici, nous puissions donner à l’enfant le plus heureusement né une de tous les arts & de toutes les sciences naturelles, suffisante pour les apprendre un jour de lui-même ; mais en faisant ainsi passer devant lui tous les objets qu’il lui importe de connaître, nous le mettons dans le cas de développer son goût, son talent, de faire les premiers pas vers l’objet où le porte son génie, et de nous indiquer la route qu’il lui faut ouvrir pour seconder la Nature.

Un autre avantage de cet enchaînement de connaissances bornées, mais justes, est de les lui montrer par leurs liaisons, par leurs rapports, de les mettre toutes à leur place dans son estime, & de prévenir en lui les préjugés qu’ont la plupart des hommes pour les talens qu’ils cultivent, contre ceux qu’ils ont négligés. Celui qui voit bien l’ordre du tout voit la place où doit être chaque partie ; celui qui voit bien une partie, & qui la connoît à fond, peut être un savant homme : l’autre est un homme judicieux ; & vous vous souvenez que ce que nous nous proposons d’acquérir est moins la science que le jugement.

Quoi qu’il en soit, ma méthode est indépendante de mes exemples ; elle est fondée sur la mesure des facultés de l’homme à ses différens âges, & sur le choix des occupations qui conviennent à ses facultés. Je crois qu’on trouveroit aisément une autre méthode avec laquelle on paroîtroit faire mieux ; mais si elle étoit moins appropriée à l’espèce, à l’âge, au sexe, je doute qu’elle eût le même succès.

En commençant cette seconde période, nous avons profité