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verroit avec moins d’effroi le plus noir cachot que les apprêts de sa parure. Tant qu’on n’a pas asservi l’enfant à nos préjugés, être à son aise & libre est toujours son premier désir ; le vêtement le plus simple, le plus commode, celui lui l’assujettit le moins, est toujours le plus précieux pour lui.

Il y a une habitude du corps convenable aux exercices, & une autre plus convenable à l’inaction. Celle-ci, laissant aux humeurs un cours égal & uniforme, doit garantir le corps des altérations de l’air ; l’autre le faisant passer sans cesse de l’agitation au repos & de la chaleur au froid, doit l’accoutumer aux mêmes altérations. Il suit de là que les gens casaniers & sédentaires doivent s’habiller chaudement en tout ] temps, afin de se conserver le corps dans une température uniforme, la même à peu près dans toutes les saisons & à toutes heures du jour. Ceux, au contraire, qui vont & viennent, au vent, au soleil, a la pluie, qui agissent beaucoup & passent la plupart de leur temps sub dio doivent être toujours vêtus légèrement, afin de s’habituer à toutes les vicissitudes de l’air & à tous les degrés de température, sans en être incommodes. Je conseillerois aux uns & aux autres de ne point changer d’habits selon les saisons, & ce sera la pratique constante de mon émile ; en quoi je n’entends pas qu’il porte l’été ses habits d’hiver, comme les gens sédentaires, mais qu’il porte l’hiver ses habits d’été, comme les gens laborieux. Ce dernier usage a été celui du chevalier Newton pendant toute sa vie, et il a vécu quatre-vingts ans.