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chimérique & fausse, on pût toujours profiter de mes observations. Je puis avoir très-mal vu ce qu’il faut faire, mais je crois avoir bien vu le sujet sur lequel on doit opérer. Commencez donc par mieux étudier vos élevés ; car très-assurément, vous ne les connoissez point. Or si vous lisez ce livre dans cette vue, je ne le crois pas sans utilité pour vous.

À l’égard de ce qu’on appellera la partie systématique, qui n’est autre chose ici que la marche de la nature, c’est-là ce qui déroutera le plus le Lecteur ; c’est aussi par-là qu’on m’attaquera sans doute ; & peut-être n’aura-t-on pas tort. On croira moins lire un Traité d’éducation, que les rêveries d’un visionnaire sur l’éducation. Qu’y faire ? Ce n’est pas sur les idées d’autrui que j’écris ; c’est sur les miennes. Je ne vois point comme les autres hommes ; il y a long-tems qu’on me l’a reproché. Mais dépend-il de moi de me donner d’autres yeux, & de m’affecter d’autres idées ? Non. Il dépend de moi de ne point abonder dans mon sens, de ne point croire être seul plus sage que tout le monde ; il dépend de moi, non de changer de sentiment, mais de me défier du mien : voilà tout ce que je puis faire, & ce que je fais. Que si je prends quelquefois le ton affirmatif, ce n’est point