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raison que vous avez trouvé en elle, me sont juger de l’agrément que vous devez trouver dans une occupation si chéris, & me sont désirer bien des fois dans la journée, d’avoir la douceur d’en être le témoin. Mais appelé par de grands & tristes devoirs à des soins plus nécessaires, je ne vois aucune apparence à me flatter de finir mes jours auprès de vous. J’en sens le désir, je l’exécuterois même s’il ne tenoit qu’à ma volonté ; la chose n’est peut-être pas absolument impossible ; mais je suis si accoutumé de voir tous mes vœux éconduits en toute chose, que j’ai tout-à-fait cessé d’en faire, & me borne à tâcher de supporter le reste de mon sort en homme, tel qu’il plaise au ciel de me l’envoyer.

Ne parlons plus de botanique, mon cher hôte ; quoique la passion que j’avois pour elle n’ait fait qu’augmente jusqu’ici, quoique cette innocente & aimable distraction me fût bien nécessaire dans mon état, je la quitte, il le faut ; n’en parlons plus. Depuis que j’ai commencé de m’en occuper, j’ai fait une assez considérable collection de livres de botanique, parmi lesquels il y en a de rares & de rechechés par les botanophiles qui peuvent donner quelque prix à cette collection. Outre cela j’ai fait sur la plupart de ces livres un grand travail par rapport à la synonymie, en ajoutant à la plupart des descriptions & des figures le nom de Linnaeus. Il faut s’être effrayé sur ces sortes de concordances, pour comprendre la peine qu’elles coûtent, & combien celle que j’ai prise, peut en éviter à ceux à qui passeront ces livres, s’ils en veulent faire usage. Je cherche à me défaire de cette collection qui me devient inutile, & difficile à transporter.