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reçue ; la prospérité étoit tellement la source de cette corruption, qu’elles cesserent ensemble ; Athenes vaincue & malheureuse réforma son théâtre.

Rome, avec des mœurs dures, un génie sévere, des guerres continuelles, & des succès lents, devoit différer long-tems à se corrompre ; mais enfin le tems arriva où ses loix se turent devant sa gloire ; les causes de sa corruption ont été trop bien développées & sont trop connues pour que je perde du tems à en parler : les sciences & les arts n’avoient encore fait que de foibles progrès, lorsque ses mœurs étoient déjà perdues : elle eut aussi la fureur des spectacles ; elle s’en servit pour fléchir ou pour remercier ses Dieux, & ils firent une partie importante de son culte. Un peuple souverain veut être amusé : des sauteurs, des combats d’animaux & d’hommes faisoient d’abord ses plaisirs : on fit ensuite venir des baladins de Toscane ; leurs pieces n’étoient que des misérables rapsodies, pleines de grossiéretés : elles portoient le nom de Satires, terme qui avoit alors le même sens que notre mot, Farce, & qui fut en conséquence détourné à une signification nouvelle qu’il a toujours conservée depuis : les bonnes pieces dramatiques que le goût des lettres produisit dans la suite, bien loin de contribuer à la corruption publique, furent une vraie réformation qui alla toujours en augmentant : Plaute, obligé de se conformer au goût de son siecle, fut d’abord très-libre ; Térence devint plus châtié ; mais le peuple ne les goûta jamais parfaitement ; il préféra toujours l’arène au théâtre.

Il ne cherchoit dans ses représentations que le spectacle de sa grandeur & de sa magnificence : les édifices se surpassoient