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les idées ne présentent que bêtes hommes & hommes bêtes. Et ce qu’il faut remarquer, c’est que tout ce discours est la note même des Pongos déclarés bêtes par tous les voyageurs, qu’il s’entête seul de rappeller à ses hommes primitifs & originaires brutes & animaux, selon sa propre expression, fille fois répétée dans son discours.

Je ne veux, je ne dois rien dissimuler qui puisse disculper M. R. Je crois même en général que c’est son caractere d’esprit plutôt que celui de son cœur qui porte ainsi tout ce qu’il a de plus respectable & de plus sacré, aux conséquences extrêmes les plus affreuses. Il attaque de bonne soi même, mais avec le même cœur & le même esprit, Locke, Hobbes, & tous les Auteurs suspects d’athéisme ou de déisme, & nommément du renversement de la société, des mœurs & de la religion.

Il rapporte donc fort au long un passage de Locke que je me dispense de copier, d’autant plus qu’il m’a paru assez sain quand je l’ai lu. M. R. a des yeux de lynx pour y voir bien du mal. Locke y rend des raisons philosophiques de la société des hommes & des animaux même. Mais ces raisons sont morales, & M. R. n’en veut que de physiques & de matérielles. Je disois d’abord en moi-même : timeo Danaos, & dona ferentes.

M. R. réprouve donc les raisons de Locke comme “morales en matiere de physique. Car, dit -il, quoiqu’il puisse être avantageux à l’espece humaine que l’union de l’homme & de la femme soit permanente, il ne s’ensuit pas que cela ait été ainsi établi par la nature.” On voit là d’abord que