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Après l’aventure du carreau de vitre cassé à l’une de vos fenêtres, en supposant que ce n’a pas été l’ouvrage de votre chere gouvernante, vous pouviez paisiblement vous retirer à Couvet, où tous vos combourgeois *

[* La communauté de Couvet, pour honorer les talens de J. J. Rousseau, lui avoit accordé le droit de bourgeoisie.] vous auroient reçu à bras ouverts. Vous n’auriez eu qu’une demi-lieue à faire, & vous étiez en sureté. Vous ne deviez point chercher de retraite dans le Canton de Berne ; vous saviez ce que votre compatriote Micheli Ducret s’y étoit attiré. Vous deviez bien vous attendre que tôt ou tard on solliciteroit votre éloignement, & qu’un apôtre de la Démocratie ne pouvoit espérer un asyle assuré dans un Etat Aristocratique. Mais vous aviez des vues impénétrables, & ceux qui ne savoient pas où butoient vos projets, pouvoient à plus forte raison que vos meilleurs amis, vous accuser d’imprudence & de légèreté.

Ce qui vous arriva dans l’isle de St. Pierre, *

[Quand J. J. Rousseau fut obligé de sortir de cette isle, où il n’y a qu’une seule maison, il sentit bien d’où le coup partoît ; alors il s’écria, en parlant du Magistrat de Geneve, ils veulent la guerre, eh bien ! ils l’auront. ] ne peut ni ne doit pas vous être reproché. On en use de même dans presque tous les Etats de l’Europe envers ceux dont on a lieu d’appréhender l’esprit inquiet & remuant. Mais oser insulter quelqu’un & l’invectiver par une calomnie outrageante, c’est déroger de propos délibéré aux sentimens de l’honnête homme, & mériter la haine & l’indignation de tous les honnêtes gens.

Apprenez de moi M. Walpole, qu’il n’y a rien de plus lâche que d’opprimer les malheureux : c’est combattre, le poignard