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Mais ce ne sont plus les Editeurs, c’est M. Hume lui-même qui va parler, c’est lui qui va caractériser son adverse partie. Je croyois, dit-il, qu’un noble orgueil, quoique porté à l’excès, méritoit de l’indulgence dans un homme de génie qui, soutenu par le sentiment de sa propre supériorité, ou par l’amour de l’indépendance, bravoit les outrages de la fortune & l’insolence des hommes.

Est-ce le langage d’un homme qui n’a étudié, comme le disent les Editeurs, que pour éclairer le genre humain ?

Je ne sais si ma mémoire me trompe, mais j’ai toujours ouï dire, que l’orgueil étoit un vice détestable & détesté par tous les Philosophes qui ont contribué à éclairer l’humanité. Que rien n’étoit plus nuisible au bonheur de la société qu’un orgueilleux insolent : & quand il plaît à M. Hume de l’ennoblir, il me paroît qu’il s’éloigne beaucoup du devoir attaché à l’état qu’il a embrassé, lui qui, sans doute, auroit dit dans une autre occasion que l’orgueil conduisoit à la tyrannie, qu’il étouffoit les sentimens de cordialité & de bienfaisance, qu’il faisoit sans cesse la guerre aux amis de la vertu, & fouloit à ses pieds l’innocence & la candeur.

Si l’épithete de noble, pouvoit convenir à ce vice affreux, sur-tout quand il est poussé à l’excès, je dirois qu’un noble orgueil porté au suprême degré, avoit si sort aveuglé M. Hume, qu’il ne s’appercevoit pas du ridicule qu’il s’attiroit dans le monde, en prenant lui-même la trompette pour publier en gros &,en détail, tout ce qu’il avoit fait en obligeant le philosophe Genevois.

Il accorde & ne peut refuser du génie à J. J. Rousseau. Est-ce qu’on