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Que la modération de M. Hume convienne à ton éloge, quand il s’agit d’examiner de sang -froid les critiques ou les censeurs de ses ouvrages : qu’il fasse briller ce grand flegme philosophique si naturel aux écrivains Anglois : tout cela est fort louable & l’auroit été davantage, s’il eût témoigné plus de tendresse, ou sinon plus de pitié pour l’accablement où se trouvoit son soi-disant ami ; & particulièrement quand celui-ci eut la foiblesse de marquer tant d’excès de sensibilité pour des procédés, dont le ridicule réjaillissoit sur ceux qui avoient eu assez de lâcheté pour les faire naître.

Plus M. Hume étoit persuadé que les querelles des Gens de Lettres sont le scandale de la Philosophie, plus il devoit faire d’efforts pour prévenir & pour étouffer par, une justification amicale, la dispute qui venait d’éclore entre lui & J. J. Rousseau. C’étoit là assurément, une occasion tout-à-fait heureuse, pour attirer au flegme philosophique tous les éloges qu’il mérite ; mais il ne l’a pas fait, les Editeurs de ses griefs s’y sont opposés : ces Messieurs vouloient peindre. Voici le pendant de leur premier tableau,

Tout le monde sait, disant-ils, que M. Rousseau, PROSCRIT DE TOUS LES LIEUX qu’il avoit habités, s’étoit enfin déterminé à passer en Angleterre.

Un démenti n’est plus à la mode, je ne m’en servirai pas. Au reste les proscriptions contre J. J. Rousseau, ne sont point un reproche à lui faire, elles sont à bien des égards son éloge, si l’on excepte l’article qui regarde la religion. Il n’a pas été proscrit du Comté de Neufchâtel ; sa maladie*

[*Une humeur inquiéte, ombrageuse, taciturne, qui selon les Pytagoriciens s’évapore en fumées qui attaquent le cerveau, & sont faire à l’esprit bien des sottises & des extravagances : c’est l’aveu de J. J. Rousseau lui-même.] seule l’en