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des distinctions honorables, voilà des prix bien supérieurs à des lauriers Académiques. D’ailleurs celui qui sert ses amis, qui soulage de pauvres familles, ira-t-il publier ses bienfaits ? ce seroit cri anéantir le mérite. Rien de plus beau que les actions vertueuses, si ce n’est le soin même de les cacher.

M. Rousseau parle de nos Philosophes avec mépris ; il cite les dangereuses rêveries des Hobbes & des Spinosa, & les met sur une même ligne avec toutes les productions de la Philosophie. Pourquoi confondra ainsi avec les ouvrages de nos vrais Philosophes, des systêmes que nous abhorrons ? Doit-on rejetter sur l’étude des Belles-Lettres les opinions insensées de quelques Ecrivains, tandis qu’un grand nombre de peuples sont infatués de systêmes absurdes, fruit de leur ignorance & de leur crédulité ? L’esprit humain n’a pas besoin d’être cultivé pour enfanter des opinions monstrueuses. C’est en s’élevant avec tout l’essor dont elle est capable, que la raison, se met au-dessus des chimeres. La vraie Philosophie nous apprend à déchirer le voile des préjugés & de la superstition. Parce que quelques Auteurs ont abusé de leurs lumieres, faudra-t-il proscrire la culture de la raison ? Eh ! de quoi ne peut-on pas abuser ? Pouvoir, loix, religion, tout ce qu’il y a de plus utile, ne peut-il pas être détourné à des usages nuisibles ? Tel est celui qu’a fait M. Rousseau de sa puissante éloquence pour inspirer le mépris des Sciences, des Lettres & des Philosophes. Au tableau qu’il présente de ces hommes savans, opposons celui du vrai Philosophe. Je vais le tracer, Messieurs, d’après les modeles que j’ai l’honneur de connoître parmi vous. Qu’est-ce-qu’un vrai, Philosophe ? C’est un homme très-raisonnable &