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Je connus que, sur-tout, cette roideur sauvage
Dans le monde aujourd’hui seroit d’un triste usage,
La modestie alors devint chere à mon cœur,
J’aimai l’humanité, je chéris la douceur,
Et respectant des grands le rang & la naissance,
Je souffris leurs hauteurs, avec cette espérance
Que malgré tout l’éclat dont ils sont revêtus
Je les pourrai du moins égaler en vertus.
Enfin, pendant deux ans, au sein de ta patrie,
J’appris à cultiver les douceurs de la vie.
Du portique autrefois la triste austérité
A mon goût peu formé mêloit sa dureté ;
Epictete & Zénon, dans leur fierté stoïque,
Me faisoient admirer ce courage héroïque,
Qui, faisant des faux biens un mépris généreux,
Par la seule verra prétend nous rendre heureux.
Long-tems de cette erreur la brillante chimere
Séduisit mon esprit, roidit mon caractere ;
Mais, malgré tant d’efforts, ces vaines fictions
Ont-elles de mon cœur banni les passions ?
Il n’est permis qu’à Dieu, qu’à l’Essence suprême,
D’être toujours heureux, & seule par soi -même :
Pour l’homme, tel qu’il est, pour l’esprit & le cœur,
Otez les passions, il n’est plus de bonheur.
C’est toi, cher Parisot, c’est ton commerce aimable,
De grossier que j’étois, qui me rendit traitable.
Je reconnus alors combien il est charmant
De joindre à la sagesse un peu d’amusement,