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de leur honte, & un témoignage du respect public pour la vertu.

S’il y a des modes de folie, de ridicule & de corruption, elles ne se trouvent que dans la capitale seulement, & ce n’est n’est même que dans un tourbillon d’hommes perdus par les richesses & l’oisiveté. Les Provinces entieres & la plus grande partie de Paris, ignorent ces excès, ou ne les connoissent que de nom. Jugera-t-on toute la nation sur les travers d’un petit nombre d’hommes ? Des écrits ingénieux réclament cependant contre ces abus ; la corruption ne jouit de ses prétendus succès que dans des têtes ignorantes ; les Sciences & les Lettres ne cessent point de déposer contre elle ; la morale la démarque, la philosophie humilie ses petits triomphes ; la comédie, la satire, l’épigramme la percent de mille traits.

Les bons livres sont la seule défense des esprits foibles, c’est-à-dire, des trois quarts des hommes, contre la contagion de l’exemple. Il n’appartient qu’à eux de conserver fidellement le dépôt des mœurs. Nos excellens ouvrages de morale survivront éternellement à ces brochures licencieuses, qui disparoissent rapidement avec le goût de mode qui les a fait naître. C’est outrager injustement les Sciences & les Arts, que de leur imputer ces productions honteuses. L’esprit seul, échauffé par les passions, suffit pour les enfanter. Les Savans, les Philosophes, les grands Orateurs & les grands Poetes, bien loin d’en être les auteurs, les méprirent, ou même ignorent leur existence : il y a plus, dans le nombre des grands. Ecrivains en tout genre qui ont illustré le dernier regne, à peine en trouvé-t-on deux ou trois qui aient abusé de leurs