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de l’Europe. Ce bon office déplaît à celle de Dijon ; elle s’en offense ; elle le paye par des invectives ; elle ne veut pas absolument qu’on croye qu’il y ait un seul homme chez elle qui fasse des Sciences le cas qu’en sont tous les savans de l’Europe révoltés contre son problême. Non est qui faciat bonum, non est usque ad unum. Après la déclaration formelle de ces Messieurs, je me garderai bien de les contredire.

On trouvera peut-être que je sors de la question. On dira qu’il peut y avoir quelqu’un des Académiciens de Dijon qui ne soit pas de l’avis dominant, mais qu’il n’y en a point qui soit capable de commettre l’indécence de réfuter, par un écrit, une décision qui auroit payé contre son avis.

Voilà, sans doute, le grand argument de Messieurs de Dijon ; mais qu’ils se dépouillent pour un moment de leur préjugé, & que dans ce moment ils regardent avec toutes les Académies de l’Europe leur problème comme une conspiration contre la république des Lettres ; alors ils sentiront que cet Académicien, assez brave pour les contredire en face & par écrit, loin d’être un traître, comme ils le pensent, seroit un digne citoyen, qui, en se faisant leur délateur, ne feroit qu’obéir aux loix les plus positives, un héros de cette république, qui en affrontant les ressentimens des conjurés, mériteroit, dans Dijon même, les titres de pere & de libérateur de la patrie.

Puisque l’Académicien réel de Dijon seroit si louable, celui qui a emprunté son titre ne sauroit être criminel ; aussi le sentiment contraire est-il encore réservé à la seule Académie de Dijon.