Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t13.djvu/159

Cette page n’a pas encore été corrigée

vils, corrompus & malheureux. Voir donc l’Auteur revenu aux vérités que nous avons établies dans nos premieres remarques. Les lumieres & la sagesse vont donc ensemble ; les savans possédent l’un & l’autre, puisqu’il n’est plus question que de leur donner du pouvoir, pour qu’ils entreprennent & fassent de grandes choses. Donc la science ne dégrade pas les mœurs & le goût. Donc le parti que l’Orateur a pris n’est pas juste, ni son discours solide.

Pour nous, hommes vulgaires, — nous n’avons pas besoin d’en savoir davantage. Les soins que coûte l’éducation des enfans, ne prouvent que trop les peines & l’appareil, & j’ajoute les stratagêmes qu’il faut mettre en usage pour inculquer aux hommes les principes de la morale, & former leurs mœurs. Non pas que la théorie de cette morale, de cette éducation soit si épineuse ; mais c’est que la pratique en est des plus pénibles, & qu’on échoue encore souvent sur certains caracteres, avec tout l’art que ce siecle éclairé a imaginé pour y réunir.

Tes principes ne sont-ils pas gravés — dans le silence des passions ? La supposition du silence des passions est charmante ; mais qui leur imposera silence à ces passions ? sinon des lumieres bien vives sur leur perversité, sur leurs suites funestes, sur les moyens de les dompter, ou même de les éviter, en élevant l’ame à des objets plus dignes d’elle ; enfin en devenant philosophes & savans.

Voilà la véritable Philosophie, — que l’un savoit bien dire, & l’autre, bien faire. Pourquoi seroit-il défendu de mériter ces deux couronnes à la fois ? Bien faire & bien penser sont