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ils venoient d’éprouver la rigueur. Il louoit le systême du Prince régnant ; il en déduisoit les avantages ; il montroit ceux qu’on y pouvoit ajouter ; & les additions même qu’il demandoit consistoient moins, selon lui, dans des changemens à faire que dans l’art de perfectionner ce qui étoit fait. Une partie de ses vues lui étoient venues sous le règne de Louis XIV ; mais il avoit eu la sagesse de les taire, jusqu’à ce que l’intérêt de l’Etat, celui du Gouvernement & le sien, lui permissent de les publier.

Il faut convenir cependant que, sous un même nom, il y avoit une extrême différence entre la Polysynodie qui existoit, & celle que proposoit l’Abbé de St. Pierre ; & pour peu qu’on y réfléchisse, on trouvera que l’administration qu’il citoit en exemple, lui servoit bien plus de prétexte que de modele pour celle qu’il avoit imaginée. Il tournoit même avec assez d’adresse en objections contre son propre systême les défauts à relever dans ce lui du Régent ; & sous le nom de réponses à ses objections, il montroit sans danger & ces défauts & leurs remedes. Il n’est pas impossible que le Régent, quoique souvent loué dans cet écrit par des tours qui ne manquent pas d’adresses, ait pénétré la finesse de cette critique, & qu’il ait abandonné l’Abbé de St. Pierre par pique autant que par foiblesse, plus offensé peut-être des défauts qu’on trouvoit dans son ouvrage, que flatté des avantages qu’on y faisoit remarquer. Peut-être aussi lui sut-il mauvais gré d’avoir, en quelque manière dévoilé ses vues secrètes, en montrant que son établissement n’étoit rien moins que ce qu’il devoit être pour de venir avantageux à l’Etat, & prendre une assiette fixe & durable. En effet, on voit clairement que c’étoit la forme de Polysynodie établie