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manquer à son devoir, il n’osera le tenter ou le tentera vainement au milieu de tant d’observateurs. Il fera donc de nécessité vertu, en sacrifiant publiquement son intérêt particulier au bien de la patrie, & soit réalité, soit hypocrisie, l’effet sera le même en cette occasion pour le bien de la société. C’est qu’alors un intérêt particulier très-fort, qui est celui de sa réputation concourt avec l’intérêt public. Au lieu qu’un Visir qui sait, à la faveur des ténèbres du Cabinet, dérober à tous les yeux le secret de l’Etat, se flatte toujours qu’on ne pour ra distinguer ce qu’il fait en apparence pour l’intérêt public de ce qu’il fait réellement pour le sien, & comme, après tout, ce Visir ne dépend que de son maître, qu’il trompe aisément, ils’embarrasse fort peu des murmures de tout le reste.

CHAPITRE X.

Autres avantages.

De ce premier avantage on en voit découler une foule d’autres qui ne peu vent avoir lieu sans lui. Premiérement les résolutions de l’Etat seront moins souvent fondées sur des erreurs de fait, parce qu’il ne sera pu aussi aisé à ceux qui feront le rapport des faits de les déguiser devant une assemblée éclairée, où se trouveront presque toujours d’autres témoins de l’affaire, que devant un Prince qui na rien vu que par les yeux de son Visir. Or, il est certain que la plupart des résolutions d’Etat dépendent de la connoissance des faits, & l’on peut dire même en général qu’on ne prend guère d’opinions