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il seroit difficile d’ajouter à la force des rairons que j’apporte pour engager le Gouvernement à les tolérer, & j’ai même lieu de présumer qu’il y a fait quelque attention. Quel gré m’en ont-ils su ? On diroit que cette lettre qui a ramené tant de Catholiques, n’a fait qu’achever d’aliéner les Protestans ; & combien d’entr’eux ont osé m’en faire un nouveau crime ? Comment voudriez-vous, Monsieur, que je prisse avec succès leur défense lorsque j’ai moi-même à me défendre de leurs outrages ? Opprimé, persécuté, poursuivi chez eux de toutes parts comme un scélérat, je les ai vu tous réunis pour achever de m’accabler ; & lorsqu’enfin la protection du Roi a mis ma personne à couvert, ne pouvant plus autrement me nuire, ils n’ont cessé de m’injurier. Ouvrez jusqu’à vos Mercures, & vous verrez de quelle façon ces charitables chrétiens m’y traitent : si je continuois à prendre leur cause, ne me demanderoit-on pas de quoi je me mêle ? Ne jugeroit-on pas qu’apparemment je suis de ces braves qu’on mene au combat à coups de bâton ? “Vous avez bonne grace de venir nous prêcher la tolérance, me diroit-on, tandis que vos gens se montrent plus intolérans que nous. Votre propre histoire dément vos principes, & prouve que les Réformés, doux peut-être quand ils sont foibles, sont très-violens si-tôt qu’ils sont les plus sorts. Les uns vous décretent, les autres vous bannissent, les autres vous reçoivent en rechignant. Cependant vous voulez que nous les traitions sur des maximes de douceur qu’ils n’ont pas eux-mêmes ! Non, puisqu’ils persécutent, ils doivent être persécutés ; c’est la loi de l’équité qui veut qu’on fasse à chacun comme il fait aux autres. Croyez-nous, ne