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dans mon esprit des doutes sur la sagesse de tous ces choix ; je ne pouvois ignorer que depuis long-tems nul ne m’approche qui ne soit expressément envoyé, & que me confier aux gens qui m’entourent c’est me livrer à mes ennemis. Pour trouver un confident fidelle il auroit falu l’aller chercher loin de moi parmi ceux dont je ne pouvois approcher. Mon espérance étoit donc vaine, toutes mes mesures étoient fausses, tous mes soins étoient inutiles, & je devois être fur que l’usage le moins criminel que seroient de mon dépôt ceux qui je l’allois ainsi confiant seroit de l’anéantir.

Cette idée me suggéra une nouvelle tentative don’t attendis plus d’effet. Ce fut d’écrire une espece de billet circulaire adresse à la nation Françoise, d’en faire plusieurs copies & de les distribuer aux promenades & dans les rues aux inconnus dont la physionomie me plairoit le plus. Je ne manquai pas d’argumenter à ma maniere ordinaire en faveur de cette nouvelle résolution. On ne me laisse de communication, une disois-je, qu’avec des gens apostes par mes perfécuteurs. Me confier à quel-qu’un qui m’approche n’est autre chose que me confier à eux. Du moins parmi les inconnus il s’en peut trouver qui soyent de bonne foi : mais quiconque vient chez moi n’y vient qu’à mauvaise intention ; je dois être sur de cela.