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pour les décrier à leur gré, ils en ont entrepris la falsification, & cette entreprise qui sembloit d’abord presque impossible est devenue par la connivence du public, de la plus facile exécution. L’Auteur n’a fait qu’une seule édition de chaque piece. Ces impressions éparses ont disparu depuis long-tems, & le peu d’exemplaires qui peuvent rester, caches dans quelques cabinets n’ont excite la curiosité de personne pour les comparer avec les recueils dont on affecte d’inonder le public. Tous ces recueils, grossis de critiques outrageantes de libelles venimeux, & faits avec l’unique projet de défigurer les productions de l’Auteur, d’en altérer les maximes, & d’en changer peu-a-peu l’esprit, ont été, dans cette vue, arranges & falsifies avec beaucoup d’art, d’abord seulement par des retranchemens qui supprimant les éclaircissemens nécessaires, alteroient le sens de ce qu’on laissoit, puis par d’apparentes négligences qu’on pouvoit faire passer pour les fautes d’impression, mais qui produisoient des contre-sens terribles, & qui, fidellement transcrites à chaque impression nouvelle, ont enfin substitue par tradition ces fausses leçons aux véritables. Pour mieux réussir dans ce projet on a imagine de faire de belles éditions qui par leur perfection typographique, fissent tomber les précédentes & restassent dans les bibliothèques ; & pour leur donner un plus grand crédit, on a tache d’y intéresser l’Auteur même par l’appât du gain, & on lui a fait pour cela, par le Libraire charge de ces manœuvres, des propositions assez magnifiques pour devoir naturellement le tenter. Le projet croit d’établir ainsi la confiance du public, de ne faire passer sous les yeux de l’Auteur que des épreuves correctes &