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de mettre le succès de leur entreprise à l’abri de tout événement imprévu. Eh quelles seroient désormais les ressources de J. J. & de ses défenseurs, s’il s’en osoit présenter ? Ou trouveroit-il des juges qui ne fussent pas du complot, des témoins qui ne fussent pas subornes, des conseils fidelles qui ne l’égarassent pas ? Seul contre toute une génération liguée, d’ou réclameroit-il la vérité que le mensonge ne répondit à sa place ? Quelle protection quel appui trouveroit-il pour resister à cette conspiration générale ? Existe-t-il, peut-il même exister parmi les gens en place, un seul homme assez integre pour se condamner lui-même, assez courageux pour oser défendre un opprimé dévoué depuis si long-tems à la haine publique, assez généreux pour s’animer d’un pareil zele sans autre intérêt que celui de l’équité ? Soyez sur que quelque crédit quelque autorise que put avoir celui qui oseroit élever la voix en sa faveur & réclamer pour lui les premieres loix de la justice, il se perdroit sans sauver son client, & que toute la ligue réunie contre ce protecteur téméraire, commençant par l’écarter de maniere ou d’autre, finiroit par tenir, comme auparavant, sa destinée à sa merci. Rien ne peut plus la soustraire à sa destinée, & tout ce que peut faire un homme sage qui l’’intéresse à son sort, est de rechercher en silence les vestiges de la vérité pour diriger son propre jugement, mais jamais pour le faire adopter par la multitude, incapable de renoncer par raison au parti que la passion lui a fait prendre.

Pour moi je veux vous faire ici ma confession sans détour. Je crois J. J. innocent & vertueux, & cette croyance est telle au fond de mon ame qu’elle n’a pas besoin d’autre confirmation.