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public sur le véritable honneur, j’en trouve beaucoup plus à copier chez soi de la musique à tant la page, qu’a courir de porte en porte pour y souffrir les rebuffades des valets, les caprices des maîtres & faire par-tout le métier de cajoleur & de complaisant. Voila ce que tout esprit judicieux devroit sentir lui-même ; mais l’étude particuliere de l’homme ajoute un nouveau poids à tout cela.

J. J. est indolent paresseux comme tous les contemplatifs : mais cette paresse n’est que dans sa tête. Il ne pense qu’avec effort, il se fatigue à penser, il s’effraye de tout ce qui l’y force à quelque foible degré que ce soit, & s’il faut qu’il réponde à un bonjour dit avec quelque tournure il en sera tourmente. Cependant il est vit, laborieux à sa maniere. Il ne peut souffrir une oisiveté absolue : il faut que ses mains que ses pieds que ses doigts agissent, que son corps soit en exercice cet que sa tête reste en repos. Voilà d’ou vient sa passion pour la promenade ; il y est en mouvement sans être oblige de penser. Dans la rêverie on n’est point actif. Les images se tracent dans le cerveau s’y combinent comme dans le sommeil sans le concours de la volonté : on laisse tout cela suivre sa marche, & l’on jouit sans agir. Mais quand on veut arrêter fixer les objets, les ordonner les arranger, c’est autre chose ; on y met du sien. Si-tôt que le raisonnement & la réflexion s’en mêlent, la méditation n’est plus un repos ; elle est une action très-pénible, & voilà la peine qui fait l’effroi de J. J. & dont la seule idée l’accable & le rend paresseux. Je ne l’ai jamais trouve tel que dans toute œuvre ou il faut que l’esprit agisse, quelque peu que ce puisse être. Il n’est avare ni de son