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par les femmes & chéri d’elles, sures de l’avantage qui doit leur en revenir. Par conséquent quelque penchant qu’ait notre homme à la tendresse, quelque goût qu’il ait naturellement pour les femmes, il n’en pourra souffrir le commerce ordinaire ou il faut fournir un perpétuel tribut de gentillesses qu’il se sent hors d’état de payer. Il parlera peut-être aussi bien qu’un autre le langage de l’amour dans le tête-a-tête, mais plus mal que qui que ce soit celui de la galanterie dans un cercle.

Les hommes qui ne peuvent juger d’autrui que par ce qu’ils en apperçoivent ne trouvant rien en lui que de médiocre & de commun tout au plus l’estimeront au-dessous de son prix. Ses yeux animes par intervalles promettroient en vain ce qu’il seroit hors d’état de tenir. Ils brilleroient en vain quelquefois d’un feu bien différent de celui de l’esprit : ceux qui ne connoissent que celui-ci ne le trouvant point en lui n’iroient pas plus loin, & jugeant de lui sur cette apparence, ils diroient ; c’est un homme d’esprit en peinture, c’est un sot en original. Ses amis mêmes pourroient se tromper comme les autres sur sa mesure, & si quelque événement imprévu les forçoit enfin de reconnoîtra en lui plus de talent & d’esprit qu’ils ne lui en avoient d’abord accorde, leur amour-propre ne lui pardonneroit point leur premiere erreur sur son compte, & ils pourroient le haïr toute leur vie, uniquement pour d’avoir pas su d’abord l’apprécier.

Cet homme, enivre par ses contemplations des charmes de la nature, l’imagination pleine de types de vertus de beautés de perfections de toute espèce chercheroit long-tems dans le