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pour l’étude des plantes : il continuoit de se livrer à cette étude avec plus d’ardeur que de succès ; soit que sa mémoire défaillante commençât à lui refuser tout service ; soit, comme je crus le remarquer, qu’il se fit de cette occupation plutôt un jeu d’enfant qu’une étude véritable. Il s’attachoit plus à faire de jolis herbiers qu’à classer & caractériser les genres & les especes. Il employoit un tems & des soins incroyables à dessécher & applatir des rameaux, à étendre & déployer de petits feuillages, à conserves aux fleurs leurs couleurs naturelles : de sorte que, collant avec soin ces fragmens sur des papiers qu’il ornoit de petits cadres, à toute la vérité de la nature il joignoit l’éclat de la miniature, & le charme de l’imitation.

Je l’ai vu s’attiédir enfin sur cet amusement, devenu trop fatigant pour son age, trop coûteux pour sa bourse, & qui lui prenoit un tems nécessaire dont il ne le dédommageoit pas. Peut-être nos liaisons ont-elles contribue à l’en détacher. On voit que la contemplation de la nature eut toujours un grand attrait pour son cœur : il y trouvoit un supplément aux attachemens dont il avoir besoin ; mais il eut supplément pour la chose, s’il en avoir eu le choix, & il ne se réduisit à converser avec les plantes qu’après de vains efforts pour converser avec des humains. Je quitterai volontiers, m’a-t-il dit, la société des végétaux pour celle des hommes au premier espoir d’en retrouver.

Mes premieres recherches m’ayant jette dans les détails de sa vie domestique, je m’y suis particulièrement attache, persuade que j’en tirerois pour mon objet des lumieres plus sures