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l’accuse, ou si l’on veut se cacher de lui se taire avec tout le monde ; il n’y a point de milieu. Cette conviction de celui qu’on accuse n’es t pas seulement l’épreuve indispensable de la vérité qu’on se croit oblige de déclarer ; elle est encore un devoir du dénonciateur envers lui-même dont rien ne peut le dispenser, sûr-tout dans le cas que vous posez. Car il n’y a point de contradiction dans la vertu, & jamais pour punir un fourbe elle ne permettra de l’imiter.

Le François.

Vous ne pensez pas la-dessus comme J. J.

C’est en le trahissant qu’il faut punir un traître.

Voila une de ses maximes ; qu’y répondez-vous ?

Rousseau.

Ce que votre cœur y répond lui-même. Il n’est pas étonnant qu’un hommes qui ne se fait scrupule de rien ne s’en fasse aucun de la trahison : mais il le seroit fort que d’honnêtes-gens se crussent autorises par son exemple à l’imiter.

Le François.

L’imiter ! non pas généralement ; mais quel tort lui fait-on en suivant avec lui ses propres-maximes, pour l’empêcher d’en abuser ?

Rousseau.

Suivre avec lui ses propres maximes ! Y pensez-vous ? Quels principes ! Quelle morale ! si l’on peut, si l’on doit, suivre avec les gens leurs propres maximes, il faudra donc mentir aux menteurs, voler les fripons, empoisonner les empoisonneurs,