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refusés selon qu’ils avoient bien ou mal gouverné l’Etat durant leur vie. L’indifférence des modernes sur tous les objets moraux & sur tout ce qui peut donner du ressort aux ames leur fera sans doute regarder l’idée de rétablir cet usage pour les Rois de Pologne comme une folie, & ce n’est pas à des François, sur-tout à des philosophes que je voudrois tenter de la faire adopter, mais je crois qu’on peut la proposer à des Polonois. J’ose même avancer que cet établissement auroit chez eux de grands avantages auxquels il est impossible de suppléer d’aucune autre maniere, & pas un seul inconvénient. Dans l’objet présent on voit qu’à moins d’une ame vile & insensible à l’honneur de sa mémoire, il n’est pas possible que l’intégrité d’un jugement inévitable n’en impose au Roi & ne mette à ses passions un frein plus ou moins fort, je l’avoue, mais toujours capable de les contenir jusqu’à certain point ; sur-tout quand on y joindra l’intérêt de ses enfans dont le sort sera décidé par l’arrêt porté sur la mémoire du pere.

Je voudrois donc qu’apres la mort de chaque Roi, son corps fût déposé dans un lieu sortable jusqu’à ce qu’il eût été prononcé sur sa mémoire ; que le tribunal qui doit en décider & décerner sa sépulture fût assemblé le plus-tôt qu’il seroit possible, que là sa vie & son regne fussent examinés séverement, & qu’apres des informations, dans lesquelles tout citoyen seroit admis à l’accuser & à le défendre, le proces bien instruit fût suivi d’un arrêt porté avec toute la solemnité possible.

En conséquence de cet arrêt, s’il étoit favorable, le feu