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tions que la patrie leur impose. Il ne doit point y avoir d’autre état dans l’île que celui de citoyen, et celui-là seul doit comprendre tous les autres.


Tant que l’argent sera utile aux Corses, ils l’aimeront ; et tant qu’ils l’aimeront, la République entretiendra parmi eux des émissaires et des traîtres qui influenceront sur les délibérations et tiendront pour ainsi dire l’État aux gages de ses anciens maîtres.


Il ne faut point compter sur un enthousiasme vif, mais toujours court, à la suite de la liberté recouvrée. L’héroïsme populaire est un moment de fougue que suit la langueur et le relâchement. Il faut fonder la liberté d’un peuple sur sa manière d’être et non pas sur ses passions. Car ses passions sont passagères et changent d’objet ; mais l’effet d’une bonne constitution se prolonge autant qu’elle, et aucun peuple ne aurait demeurer libre qu’aussi longtemps qu’il se trouve bien de la liberté.


Qu’ils se ressouviennent bien que toute espèce de privilège est au profit des particuliers qui les obtiennent, et à la charge de la nation qui les donne.


C’est la contradiction ridicule où tombent tous les gouvernements violents, qui voulant tenir les peuples dans un état de faiblesse, veulent pourtant se mettre par eux dans un état de force.