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LE GRAND SILENCE BLANC

Sans répliquer, je lui allonge un direct et voilà mon homme les quatre fers en l’air.

J’étais fou furieux. Quoiqu’il fût à terre, je le bourrai consciencieusement ; je crois même que je lui administrai, en plus des coups de poing, quelques solides coups de souliers ferrés dans les côtes, histoire de lui apprendre à vivre.

Las de frapper, je m’arrêtai et rentrai dans ma hutte. Lorsque je ressortis, l’homme avait décampé, me laissant en héritage la chienne qui se traînait en geignant.

Elle mit bas le jour même. Cinq chiots morts-nés, un vivant. Le vivant, le voilà, c’était Tempest, ce voyou, ce vieux frère !

Je gratte de mon index le crâne du chien qui rit. Ma parole ! je vous dis que Tempest rit lorsqu’on lui gratte le crâne. Ses yeux pétillent, ses flancs s’agitent et puis, il a une de ces façons de mettre sa gueule de travers.

— C’est bon, c’est bon, je n’insiste pas, fait Gregory Land, il rit, il rigole.

— Parfaitement.

Et je poursuis :

— J’ai soigné la mère et le fiston ; la mère est morte, un matin, écrasée par un bloc de glace. Le fiston, le voici, j’en ai fait un joyeux gaillard. Nous en avons couvert des milles et des milles tous les deux, hein ?

Tempest répond par un grognement affirmatif.