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LE GRAND SILENCE BLANC

au contact du feu, se dégèlent. Lui aussi n’a pu rester seul. Je contemple l’inconnu, il est heureux de vivre, ses paupières s’avivent. Il parle, il parle, il parle.

Ce n’est, pourtant pas un intellectuel, un cérébral, celui-là. C’est une splendide brute taillée pour le combat.

La pensée qui voltige de-ci de-là s’est cogné les ailes dans la cage étroite de ce cerveau… Et l’homme a fait seize milles par un temps abominable, il a fui droit devant lui, risquant cent fois la mort pour ne pas rester seul, ce soir, seul avec la pensée qui ronge, la pensée qui vrille, la pensée qui affole, la pensée qui tue.

Enfin, l’homme se tait. Il fume silencieusement sa pipe, par bouffées mesurées et la fumée bleuâtre enveloppe sa tête. Il clôt à demi ses paupières. Pour un peu, il grognerait avec satisfaction comme Tempest.

L’homme est une bête sociable. Celle-ci maintenant est heureuse.



Lorsque Mac O’Neil a fini de fumer, il tape sa courte pipe contre son talon et dit :

— Oui, je m’ennuyais à crever ; parler à ses