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LE GRAND SILENCE BLANC



Parce que c’est dimanche ! Alors seulement je regarde l’homme qui vient de me donner une raison aussi convaincante. C’est un gars solidement râblé, un Cévenol de l’Aveyron ou de la Lozère, j’en jurerais, et tout à l’heure, lorsque je me rappellerai le nom que Gregory lui donne : César Escouffiat, je n’aurai plus aucun étonnement.

Je comprends alors l’infini de cette réponse.

— Parce que c’est dimanche !

Toute l’âme française est là. L’âme paysanne ou l’âme bourgeoise si identiquement même. Dimanche, la blouse neuve bien empesée ou la redingote sortie de l’armoire. Dimanche, toute la tradition, toute la beauté sentimentale de la race. Et soudain, la neige s’efface, le ciel gris se dépouille pour s’azurer légèrement, j’entends les cloches du pays, je vois les bandes rieuses de jeunes filles et de jeunes garçons sous les platanes feuillus, les petits rentiers assis sur le banc de la promenade, les vieux sur le seuil de leur porte, et je sens tout le parfum qui monte de la terre natale…

Et je songe à toutes les batailles que l’homme-qui-porte-un-chapeau-haut-de-forme a dû livrer pour faire respecter sa volonté.